Si l’on nous dit de distinguer entre images et sens, nous pouvons objecter : pourquoi ne l’a t-on pas dit plus tôt ? Car il semble bien que l’on ait enseigné auparavant autre chose : il n’aurait pu y avoir autrement de procès Galilée. On en vient finalement à soupçonner cette thèse de n’être qu’un subterfuge de l’Église et des théologiens, qui ne savent vraiment plus quoi faire, mais sans vouloir l’avouer, et qui cherchent ainsi quelque artifice derrière lequel se retrancher…
Mais nous ne pouvons échapper à la crainte d’être peu à peu poussés dans le vide, et que vienne le moment où il n’y aura plus rien à préserver, à protéger, où tout le domaine de l’Écriture et de la foi sera occupé par un rationalisme peu enclin à prendre tout cela au sérieux. A quoi s’ajoute une autre inquiétude. Si les théologiens ou même l’Église peuvent modifier de la sorte les limites entre image et contenu, les frontières entre ce qui se perd dans le passé et ce qui garde aujourd’hui une valeur, pourquoi ne pas faire de même en d’autres domaines, par exemples celui, des miracles de Jésus ? Et pourquoi pas même jusqu’au cœur, là où se trouvent la Croix et la Résurrection du Seigneur ? Une argumentation qui prétend défendre la foi en disant « Derrière ce qui est écrit et que nous ne pouvons plus défendre, il y a quelque chose de plus profond », une telle argumentation finit par être davantage un péril pour la foi.
Joseph Ratzinger, Au commencement, Dieu créa le Ciel et la Terre.