Je l'ai lu dans les livres mais je ne l'ai pas vécu, étant trop jeune à cette époque pour sérieusement m'interesser au foot.
1985 : BORDEAUX en Demie Finale de la Coupe des Champions
16e de finale : Girondins de Bordeaux (3-2) (0-0) Athletic Bilbao
En cette fin d'été 1984, le moral est au beau fixe aux Girondins de Bordeaux. Le club a remporté trois mois plus tôt son premier titre de champion en trente-quatre ans, mettant enfin un terme à une frustrante série de secondes places.
L'équipe de France, à forte ossature bordelaise, vient de remporter à l'Euro 84 le premier titre majeur du football français. L'on se dit que l'occasion est belle pour les Girondins d'aller jusqu'au bout en Coupe d'Europe, ce qu'aucune équipe française n'a réussi jusque là. L'entraîneur des Girondins, un certain Aimé Jacquet, résume le tout d'une formule lapidaire à la veille du tirage au sort du premier tour de la Coupe des Champions : « La France est championne d'Europe. Bordeaux est champion de France. Nous n'avons à craindre personne. »
Le sort met immédiatement cette belle assurance à l'épreuve en offrant aux Girondins un cadeau empoisonné : l'Athletic Bilbao, représentant d'un football espagnol alors en pleine euphorie (la sélection nationale vient d'atteindre la finale de l'Euro 84), avec match aller à Bordeaux.
Le piège semble amorcé après 90 minutes à Lescure. Dirigés de main de maître par un inconnu nommé Javier Clemente (qui s'illustrera ensuite aux commandes de l'équipe nationale espagnole et de l'OM, entre autres), l'Athletic a planté des contres assassins face à la forte domination bordelaise.
Endika (32ème) et Salinas (63ème sur penalty) ont répondu du tac au tac à Dieter Müller (30ème) et Battiston (58ème) et les Basques ne se sont inclinés que 3-2 (Lacombe, 79ème).
VIDEO : Bordeaux 3-2 Bilbao
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Mais au retour, les Girondins font mentir la réputation de fragilité des équipes françaises à l'extérieur.
Solidaires, bien organisés, présents dans les duels, ils préservent un 0-0 qui leur offre une qualification pleine de promesses.
8e de finale : Girondins de Bordeaux (1-0) (1-1) (ap) Dinamo Bucarest
Le second tour oppose les Girondins au Dinamo Bucarest, où évolue une bonne moitié de l'équipe nationale roumaine qui vient elle aussi de se distinguer à l'Euro 84 en éliminant notamment l'Italie.
Les Girondins reçoivent de nouveau en premier et s'imposent difficilement 1-0 (Müller, 34ème).
VIDEO : Bordeaux 1-0 Dinamo Bucarest
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Au retour, Dinamo marque d'entrée (Dragnea, 9ème) et les Girondins subissent la domination forte mais stérile du Dinamo jusqu'au terme du temps réglementaire.
En prolongation, le spectre de l'élimination en UEFA deux ans plus tôt par d'autres Roumains, ceux de Craiova (1-0, 0-2 a.p.), se profile... mais les Girondins tiennent, cette fois-ci, et Lacombe arrache à la 113ème minute l'égalisation qui envoie les Marine et Blanc en quarts de finale pour la première fois de leur histoire.
L'on commence à se dire que ce Bordeaux-là peut voyager
VIDEO : Dinamo Bucarest 1-1 Bordeaux
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1/4 de finale : Girondins de Bordeaux (1-1) (1-1) (tàb 5-3) Dniepr Dniepropetrovsk
Seule équipe française encore en course au printemps 1985, Bordeaux tombe sur un nouvel os avec les Soviétiques de Dniepropetrovsk, qu'il doit (encore !) recevoir en premier.
On connaît peu de choses de ces surprenants champions d'URSS avant le match aller, et pas en tout cas le gardien Krakovsky qui multiplie les miracles, arrêtant même un penalty de Dieter Müller. Lyuty (43ème) répond sur un contre limpide à l'ouverture du score de Lacombe (10ème), puis Krakovsky préserve le nul quasiment à lui seul face à l'écrasante domination girondine.
VIDEO : Bordeaux 1-1 Dnierpopetrovsk
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Le match retour manque de tourner à la farce. La ville de Dniepropetrovsk, classée zone stratégique car on y fabrique des missiles, est en effet interdite aux étrangers et le match est déplacé vers la ville voisine de Krivoï-Rog où les Girondins sont logés de force.
Les conditions de séjour et d'entraînement sont déplorables, à tel point que le président Claude Bez menace de ne pas faire jouer. L'incident est finalement évité quelques heures avant le coup d'envoi et le match a lieu sur une pelouse gorgée d'eau, grillée par le gel, indigne d'une rencontre de Coupe d'Europe.
D'un splendide coup de tête sur corner, Lissenko (12ème) met tôt les Soviétiques en position de force. Les Girondins sont ensuite lourdement dominés pendant 70 minutes avant que les champions d'URSS ne paient leurs efforts.
Après un premier contre et un arrêt décisif de Krakovsky, c'est Tusseau (75ème) qui arrache l'égalisation sur le second tir au but bordelais du match !
La prolongation est plutôt à l'avantage des Girondins, mais Krakovsky sauve encore son camp par deux fois et il faut en venir aux tirs aux but.
Les Bordelais marquent leur quatre premiers sans coup férir face à ce diable de gardien qui les a si longtemps écœurés, Dropsy arrête un tir soviétique, et c'est le très décrié Portugais Chalana, à peine remis d'une grave blessure, qui entre dans la légende des Girondins en inscrivant le tir au but victorieux... de son mauvais pied, le droit !
Aime Jacquet, alors entraineur à cette époque déclara lors de l'émission "20 ans de Football" de Canal Plus : "Encore aujourd'hui je me demande comment il (Chalana) a fait pour marquer ce penalty".
VIDEO : Dnierpopetrovsk 1-1 Bordeaux
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1/2 de finale : Juventus (3-0) (0-2) Girondins de Bordeaux
Pas d'adversaire facile à espérer en demi-finale, et c'est la Juventus qui sort du chapeau avec Platini, Boniek, et une demi-douzaine de champions du monde en titre. Cette fois, pourtant, on se déplace d'abord au Stadio Comunale et son ambiance de feu.
Aimé Jacquet a commis une lourde erreur tactique en décidant de ne pas prendre Platini en marquage individuel. Le maestro est en grande forme et les Girondins sont surclassés, concédant trois buts sans en rendre un seul.
Si ceux de Boniek (28ème) et de Platini (71ème) ne prêtent pas à discussion, celui de Briaschi (68ème) est quant à lui entaché d'une faute flagrante du Turinois, non sifflée par l'arbitre, qui fera naître bien des regrets.
VIDEO : Juventus 3-0 Bordeaux
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Car deux semaines plus tard en Gironde, les Marine et Blanc, peut-être piqués au vif par la "une" assassine de L'Équipe au lendemain de Turin (« La Juve, c'est autre chose »), livrent une prestation du meilleur niveau européen. 40 211 spectateurs sont venus ce 25 avril 1985 à Lescure (un record qui tient toujours) pour exhorter les Dropsy - Thouvenel, Specht, Battiston, Tusseau - Girard, Tigana, Giresse, Rohr puis Chalana - Lacombe, Müller, qui se lancent à l'assaut dès le coup d'envoi.
Ils mènent rapidement 1-0 (Dieter Müller, 25ème) et acculent la Juve sur son but, poussant sans s'affoler et sachant ne pas s'exposer aux contres.
Mais les Italiens tiennent sans faiblir... jusqu'à la 79ème minute. Un corner girondin est mal renvoyé par la défense turinoise sur Battiston qui, seul à 30 mètres du but, arme posément une frappe monumentale qui foudroie le gardien Bodini.
La fin de match est exceptionnelle d'intensité. Les Italiens renvoient comme ils peuvent, le ballon revient sans arrêt sur leur but, mais rien ne passe, Bodini réalisant même l'impossible sur un tir à ras de terre de Tigana au coin des six mètres dans les arrêts de jeu.
Vainqueurs 2-0, les Girondins doivent rendre les armes avec les honneurs et un peu d'amertume.
Sans ce second but litigieux de Briaschi à l'aller, en effet, qui sait ce qui aurait pu arriver ?
La suite des événements confirmera que le Liverpool de Dalglish et Rush, champion d'Europe en titre et adversaire malheureux de la Juve (0-1) en finale un mois plus tard à Bruxelles, était prenable cette année-là...
VIDEO : Bordeaux 2-0 Juventus
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