Mariano Rajoy peut-il se maintenir au pouvoir? C'est la question que se pose toute l'Espagne, alors que sa formation, le Parti populaire (PP, droite), est engluée dans l'affaire Bárcenas, une affaire de financement occulte et de rémunérations illégales. Ou, dans des termes plus bienveillants: que peut faire Rajoy pour convaincre de sa légitimité? La partie semble complexe. Car désormais, toute l'opposition, sociale et politique, fait cause commune autour d'une revendication: la démission de Rajoy.
L'exigence partait d'abord d'une initiative populaire: une pétition déposée sur le site change.org qui revendique plus de 800.000 signatures. Dans la rue, elle a été reprise par des centaines de manifestants devant les sièges du PP, ou encore par cette poignée de personnes qui, entre dimanche et lundi, ont passé la nuit emmitouflées dans des couvertures sur la Puerta del Sol de Madrid. La virulence de la crise - le nombre de chômeurs (4,98 millions) - a battu un nouveau record ce lundi, alimente la défiance à l'égard du pouvoir.
Un «fardeau» dans une Espagne en crise
La demande a ensuite été endossée par les petits partis de gauche, puis, dimanche, par la première formation de l'opposition, le Parti socialiste (PSOE). «Monsieur Rajoy ne peut pas diriger notre pays dans un moment aussi délicat. Son maintien à la tête du gouvernement ne fait qu'aggraver la crise politique», a lancé son chef de file, Alfredo Pérez Rubalcaba, qui a qualifié Rajoy de «fardeau». Les socialistes sont bien conscients que leur marge de manœuvre est réduite, en raison de la majorité absolue du PP au Parlement bien sûr, mais aussi parce que le PSOE est également touché par de possibles affaires de corruption. Aussi réclament-ils une solution interne: un changement de chef, davantage que des élections anticipées.
Rajoy, pourtant, avait lancé la contre-offensive. Samedi dernier, il avait adressé un message à la direction de son parti, une déclaration retransmise en direct aux journalistes rassemblés dans la salle de presse du siège national du PP - la formule, critiquée, permettait d'esquiver les questions des médias. «C'est faux, avait-il répondu aux accusations du journal El País, qui diffuse des cahiers attribués à l'ancien trésorier du Parti, Luis Bárcenas. Jamais, je dis bien jamais, je n'ai reçu ni distribué de l'argent noir ni dans ce parti ni nulle part ailleurs». Rajoy s'est par ailleurs engagé à publier ses déclarations d'impôts sur le site internet du gouvernement.
La probité de Rajoy
L'affirmation de son innocence a pu convaincre une partie des Espagnols. Même parmi ses opposants, beaucoup de responsables politiques croient en la probité de Rajoy. Et la presse, dont El País, a publié des témoignages accréditant son intervention de pour mettre fin aux pratiques les plus douteuses. Mais comme l'écrit El Mundo , qui publie ce lundi de nouveaux témoignages faisant état d'un véritable système de financement occulte organisé, l'honnêteté du parti, elle, est «bien plus douteuse». Dans son éditorial, le quotidien incite Rajoy à «reconnaître que le PP a reçu des dons opaques» et à «annoncer une enquête afin de déterminer si certains membres de la direction du parti ont reçu des compléments de salaires (illégaux)».
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