pour notre ami N7 qui dit ne pas avoir entendu parler de ce film http://www.france24.com/fr/20130218-cin ... cumentaire
Les témoignages récoltés par Dror Moreh auprès de six anciens patrons du Shin Bet, le service de sécurité intérieure, s’apparentent davantage à l’autocritique qu’au grand déballage.
Avec une transparence rare, ces hommes, qui jouèrent un rôle de premier plan dans la politique sécuritaire d'Israël, décrivent la manière dont ils ont géré les graves crises ayant jalonné l’histoire du pays. Sans omettre les pires ratés. Comme le détournement, en 1984, à Tel-Aviv, du "bus 300" qui se solda par l’exécution de deux ravisseurs palestiniens, ou encore les "dommages collatéraux" (14 morts et 150 blessés) provoqués par le largage "cible" d'une bombe d'une tonne contre une habitation de Gaza où résidait Salah Shehadeh, chef de la branche armée du Hamas… "Dans l’antiterrorisme, on oublie la morale", lance à la caméra Avraham Shalom, qui dirigea le service de 1980 à 1986.
Le Shin Bet sur le divan
Hormis quelques lapidaires sorties de cet acabit, ce sont surtout les doutes qui affleurent tout au long de cette heure et demie de révélations. À force de bavures, d’arrestations sommaires, et de raids à l’aveugle, ces dirigeants, qu’on peut difficilement soupçonnés d’angélisme naïf, en viennent à remettre en cause la politique de représailles que le gouvernement israélien applique de manière quasi systématique. "Le terroriste des uns est le résistant des autres", a même fini par comprendre Yuval Diskin après six années passées à la tête du Shin Bet (2005- 2011).
Trop longtemps obnubilés par la menace terroriste palestinienne, les anciens du Shin Bet expriment également leur désarroi de ne pas avoir su prévenir l’émergence d’un ultra-nationalisme religieux israélien qui mena à l’assassinat du Premier ministre Yitzhak Rabin en 1995. Un traumatisme qui finit d’ébranler les certitudes. "On gagne toutes les batailles, mais on perd la guerre", admet Ami Ayalon (directeur du Shin Bet de1996 à 2000). Le constat est amer : la politique sécuritaire menée par Israël, tant à l’intérieur que dans les territoires occupées, est contre-productive.
Aussi, les six anciens patrons du contre-espionnage israélien insistent-ils sur l’impérieuse nécessité de privilégier le dialogue aux opérations armées. "On doit discuter avec tout le monde, c'est un principe de base dans notre métier", prône l’un d’eux. "Quand vous quittez le Shin Bet, vous devenez un peu gauchiste…", confesse même un autre.
Car ce qui frappe le plus, c’est le sentiment d’abandon auquel les intervenants disent avoir été confrontés. Tous déplorent en effet le manque de stratégie et de cohérence de dirigeants politiques davantage obsédés par les élections que par la résolution du conflit israélo-palestinien. Principal cible des critiques : Benjamin Netanyaou, actuel chef du gouvernement, régulièrement égratigné pour son peu d’empressement à réenclencher le processus de paix.
Sorti en Israël alors en pleine campagne pour les législatives de janvier, le film de Dror Moreh a d’ailleurs fait salle comble. Mais n’a suscité aucun débat au sein de la classe politique. Une distinction lors de la cérémonie des Oscars, où il est également nommé dans la catégorie du meilleur documentaire, offrira peut-être l’occasion de se pencher sur la question…