En tant que mère de jumeaux monozygotes (les jumeaux monozygotes (univitellins, " vrais ", " identiques") proviennent de la division d'un œuf fécondé unique au départ), je me suis posée la question sur leur devenir avant qu'ils naissent. Se prendront-ils pour un seul individu en deux personnes ayant une personnalité très semblable partageant absolument tout, ou feront-ils la différence en se voyant chacun comme un être propre ayant ses propres envies, ses propres joies et peines, sa propre façon de voir etc ...
En quoi, les jumeaux sont-ils spécifiques?
Fabrice Bak : Les jumeaux ont un développement spécifique, avec des étapes propres. Les études sur des populations de jumeaux ont permis d’identifier ce modèle de développement naturel.
Entre la naissance et deux ans, ils sont dans une phase dite de fusion gémellaire. Les parents vont avoir tendance à les unifier plutôt qu’à les considérer comme étant à l’origine de demandes distinctes. Si un bébé a faim, ils vont nourrir les deux ; s’ils changent l’un, ils vont changer l’autre. Face à une surcharge de travail, les parents n’ont d’autre possibilité que de procéder ainsi. Certains psychologues, à propos des mamans de jumeaux en bas âge, parlent d’ailleurs de "supers mamans" tant elles sont accaparées.
D'abord, dès leur naissance ils partagent évidemment les mêmes besoins qu'ont tous les bébés. Nourrir et changer l'un et l'autre ce n'est pas les unifier car il est normal qu'ils mangent en même temps ou presque ayant eu depuis leur naissance une régularité que tout bébé a. Ce n'est donc pas à cause de la surcharge de travail mais bel et bien un besoin naturel qui est celui de manger.
Je ne pense pas avoir été une super maman et mon mari un super papa, nous dormions moins c'est tout, quand les jumeaux étaient petits. Je me souviens qu'il fallait donner les biberons toutes les quatre heures, évidemment la durée des biberons étant plus longue, le sommeil était moindre. Mais on s'habitue vite à ce rythme.
A partir de deux ans, lorsque les enfants commencent à envahir un peu plus leur environnement et développer leur langage, les parents vont les positionner dans une phase dite de complémentarité, en leur attribuant des caractéristiques propres, qui se complètent. Parfois, certes, de manière un peu caricaturale : l’un est plus doux, l’autre plus violent ; l’un est gentil, l’autre plus agressif ; l’un aime le sucré, l’autre le salé, etc. Au cours de cette période, René Zazzo, psychologue spécialiste des jumeaux, parlait d’un rapport de dominant à dominé. On sait aujourd’hui que ce qu’il évoquait comme un rapport figé ne l’est absolument pas. Ce rapport ne cesse de se modifier au cours de cette phase, selon les activités proposées aux enfants.
Chez mes jumeaux, il n'y a jamais eu de rapport dominant dominé, ils ont toujours agi comme un frère avec un autre frère, chamaillerie et complicité étant comme dans toute fratrie.
A partir de six ans, une première phase d’autonomie apparaît. De par la scolarité notamment, les enfants vont véritablement être considérés comme étant à l’origine de demandes spécifiques, avec une personnalité bien distincte.
La seconde phase d’autonomie survient au moment de l’adolescence, autour de 12-13 ans.
Dès la maternelle, j'ai voulu qu'ils soient dans la même classe où ils n'ont pas cherché à être l'un à côté de l'autre, chacun partant vers une activité propre. Puis, plus grands, ils ont voulu ne plus être dans la même classe, donc c'était ok. En fait, j'ai voulu qu'ils choisissent car en les séparant dès le CP voire la maternelle, ils n'auraient pas eu à choisir.
La gémellité a toujours été une curiosité, mais quand on se retrouve parents de jumeaux on se rend compte que les élever c'est les élever comme les autres enfants, et toutes les observations qui ont été faites sur les jumeaux, il faut les laisser de côté car ce sont les parents qui connaissant mieux que personne leurs enfants. La crainte que j'ai eue avant leurs naissances, s'est estompée dès leurs naissances.