Il aura fallu 30 ans pour restaurer le camp des Milles et en faire un lieu de mémoire. Inauguré ce lundi par Jean-Marc Ayrault, il est le seul camp d'internement et de déportation resté intact en France. Entre 1939 et 1942, plus de 10.000 personnes, dont de nombreux artistes et intellectuels, ont été internées dans cette ancienne tuilerie située près d'Aix. «C'est une usine, un lieu de travail ordinaire au bout d'un village ordinaire, au milieu des cigales et du soleil. C'est dans cet ordinaire que des gens ordinaires ont vécu l'extraordinaire», déclare Alain Chouraqui, le président de la Fondation des Milles, mémoire et éducation. Avec ce musée, on fait le pari que l'homme peut se servir du passé, que l'Histoire peut éclairer l'avenir».
«Il y avait beaucoup de Justes»
«On était loin d'imaginer que les Français puissent nous arrêter pour nous remettre aux Allemands», raconte Herbert Traube, interné aux Milles après la rafle du 16 août 1942. Quand je suis arrivé au camp, j'avais 16 ans, j'étais seul, alors je ne pensais qu'à m'échapper pour ne pas subir ce que l'on voulait faire de moi. » Enfermé quelques mois plus tard dans un wagon le menant au camp de Rivesaltes, il réussit à s'enfuir. «Si la tête passe entre les barreaux, le corps passe», lui a soufflé un autre déporté. Une fois dehors, il rejoint Marseille où des habitants le cachent, avant de s'engager dans la Légion étrangère sous une fausse identité. «On parle souvent des méchants qui ont persécuté, mais il y avait aussi beaucoup de Justes, des gens bien». Herbert a très peu raconté à ses deux enfants son passé. Pour «oublier, par honte d'être vivant, et parce que les gens ne voulaient écouter.» Mais aujourd'hui, à 88 ans, il s'attache à livrer cette période de sa vie à ses quatre petits enfants: «Cela ne doit jamais se reproduire. Jamais». Herbert sera là lundi, pour transmettre la flamme du souvenir.
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