Voilà pourquoi bibliquement ca me semble intenable.
Le NT parle très peu de Marie et pourtant sans elle, personne ne parlerait du Christ Jésus car Marie a permis l'incarnation de la Parole.
Pourquoi le dogme de Marie « Corédemptrice » serait-il d’actualité ?
Point de vue de Mgr Arthur B. Calkins, membre de l’Académie Mariale Pontificale Internationale.
Interview réalisée par l’agence catholique de presse « KATH.NET ». Mgr Calkins est un prêtre de l’archidiocèse de la Nouvelle-Orléans, aux Etats-Unis, où il a servi dans de nombreuses paroisses. Il a une licence en théologie avec spécialisation en mariologie de l’International Marian Research Institute de Dayton et un doctorat dans le même domaine de la Faculté Pontificale de Théologie « Saint Bonaventure » de Rome (le « Seraphicum »). Auteur de diverses publications en mariologie et spiritualité, il a été nommé membre correspondant de l’Académie Mariale Pontificale Internationale en 1985 et membre correspondant de l’Académie Théologique Pontificale Romaine en 1995. Il est représentant de la Commission Pontificale « Eccelsia Dei » depuis 1991. En 1997, il a été nommé Chapelain de Sa Sainteté avec le titre de Monseigneur.
KATH.NET : Dans une récente interview, le Père Stefano de Fiores s’est prononcé contre l’opportunité d’une définition dogmatique de Marie comme Corédemptrice, en affirmant que nos frères séparés devraient être consulté au sujet d’une telle définition et en déclarant qu’un certain type de consensus devrait être atteint avec eux avant qu’une définition ne devienne possible. Qu’en pensez-vous ?
Mgr Calkins : Mon premier commentaire est qu’un œcuménisme catholique authentique ne devrait jamais être considéré comme une simple affaire de consensus ou compromis même si c’est parfois l’impression que cela donne aujourd’hui. Si nous, catholiques, devons avoir un authentique amour chrétien envers nos frères séparés et respecter leurs points de vue, nous ne devons pas moins avoir amour et respect pour La « foi catholique qui nous vient des apôtres ». C’est pourquoi je ne crois pas que nous devons permettre à nos frères séparés ou au « politiquement correct » de dicter la doctrine catholique ou de décider quand il est opportun de la proclamer.
KATH.NET : Mais est-ce qu’il ne paraît pas inutile, voire contre productif de promouvoir une définition de Marie comme Corédemptrice alors que la question soulève des objections à l’intérieur et à l’extérieur de l’Église et que tant d’autres sujets semblent beaucoup plus importants ?
Mgr Calkins : Si le rôle corédempteur de Marie soulève des objections à l’intérieur de l’Église, je crois que c’est parce qu’il y a souvent eu une tendance inconsciente de la part des catholiques ces derniers temps à accepter le dogme luthérien fondamental du « Christ seul » sans reconnaître que la doctrine catholique a toujours maintenu la centralité et primauté absolues du Christ tout en ne niant pas la nécessité de la collaboration de l’homme dans l’œuvre du salut. De plus, l’enseignement catholique à partir des Pères apostoliques a clairement soutenu que personne n’a autant pleinement collaboré à l’œuvre de salut que Marie, la « Nouvelle Ève ». C’est là une « vérité salvatrice » qui dit beaucoup au sujet du rôle de Marie dans l’économie du salut et dans nos vies, ainsi qu’à notre sujet, au sujet du salut et la valeur de la souffrance salvifique. Si d’autres sujets paraissent plus importants que ceux-ci, je crains que ce soit parce que nous avons perdu nos fondements philosophiques et théologiques et que nous sommes devenus des pragmatistes « politiques ».
KATH.NET : Le Père de Fiores a dit que « le titre de Corédemptrice n’a plus été employé depuis Pie XII, et les papes ne le mentionnent plus afin précisément de ne pas créer des malentendus avec les protestants ». Comment répondez-vous à cela ?
Mgr Calkins : La première mouture du document qui allait finalement devenir le chapitre 8 de Lumen Gentium reconnaissait explicitement la légitimité du terme de Corédemptrice appliqué à Notre Dame, mais se retint de l’utiliser pour ne pas causer des problèmes excessifs avec nos frères et sœurs protestants. Je crois que nous sommes libres de discuter la sagesse d’une telle approche. Le fait est que le chapitre 8 de Lumen Gentium (spécialement les paragraphes 57-58 et 60-62) accorde plus d’attention à la collaboration tout à fait unique de Marie dans l’œuvre de notre salut que tous les autres conciles œcuméniques réunis, même si le mot « Corédemptrice » n’a pas été employé !
Mais une clarification ultérieure s’impose aussi : le pape Jean-Paul II a parlé de Notre Dame en tant que Corédemptrice ou de son rôle corédempteur au moins six fois. Je les ai récemment énumérés dans mon article « The Mystery of Mary Coredemptrix in the Papal Magisterium » dans Mark MIRAVALLE (éd.), Mary Co-redemptrix: Doctrinal Issues Today (Goleta, Californie: Queenship Publishing, 2002) et j’ai analysé le plus importants de ces textes, l’homélie du pape à Guayaquil, en Équateur, le 31 janvier 1985, dans mon article « Pope John Paul II’s Ordinary Magisterium on Marian Coredemption: Consistent Teaching and More Recent Perspectives » dans Mary at the Foot of the Cross – II (New Bedford, Massachusetts: Academy of the Immaculate, 2002). Quoiqu ‘il y ait certains mariologues qui veulent qualifier tous ces emplois de « marginaux donc dépourvus de poids doctrinal », je me permets de ne pas partager leur point de vue et je trouve leur jugement étrangement en désaccord avec la déclaration de Lumen Gentium 25 sur le magistère ordinaire du pape.
KATH.NET : Pourquoi appuyez-vous une définition de Marie en tant que Corédemptrice ?
Mgr Calkins : J’appuie une telle définition parce que je crois qu’il s’agit d’une « vérité salvifique » que l’Église de notre temps a particulièrement besoin d’entendre et d’assimiler. Ce n’est pas une vérité « nouvelle », mais c’en est une que l’Esprit Saint a mise en lumière avec toujours plus de précision au cours du dernier millénaire (cf. les allocutions du pape lors des audiences générales du 25 octobre 1995 et du 9 avril 1997). De toute évidence, ce fut un objet d’attention pour le Concile Vatican II et, comme c’est le cas pour tant d’autres thèmes conciliaires, nous commençons à peine à saisir la richesse de ce qui y a été dit, en particulier grâce à l’enseignement du pape Jean-Paul II. Bien sûr, le terrain doit être préparé pour une telle définition et, au cours des dernières années, d’excellentes études ont été consacrées à ce sujet, notamment en anglais et en italien. Le professeur Mark Miravalle a déjà publié quatre volumes d’études (cf. www.queenship.org), les Frères Franciscains de l’Immaculée à Frigento, de nombreuses monographies et les Frères Américains de l’Immaculée, deux volumes d’études spécialisées (un troisième est en route, cf. www.marymediatrx.com). Des études sur la collaboration de Marie à l’œuvre de la rédemption ont aussi commencé à paraître en d’autres lieux comme la faculté de théologie de Lugano en Suisse.
KATH.NET : Quels seraient, selon vous, les avantages d’une telle définition ?
Mgr Calkins : S’il est vrai que Dieu a attribué à Marie un rôle unique dans l’œuvre de notre rédemption, il nous faut le reconnaître, le célébrer et en recueillir les bienfaits. Les quatre premiers dogmes marials (maternité divine, virginité perpétuelle, Immaculée Conception, Assomption) ont à faire avec la personne de Marie et se sont déployés d’une manière providentielle. Maintenant, je crois qu’il est temps de mettre en lumière son rôle de principal collaborateur humain à l’œuvre de notre rédemption, son rôle de Médiatrice dont la médiation unique découle totalement de celle du Christ (cf. Lumen Gentium 60), son rôle d’Avocate (après le Christ et l’Esprit Saint) qui ne cesse jamais d’intercéder pour ses enfants jusqu’à ce que le dernier d’entre eux soit conduit dans la patrie céleste (cf. Lumen Gentium 62). Plus nous prenons conscience de son rôle, plus nous pouvons en être enrichis. Je crois que les avantages, ne serait-ce que par rapport à la clarification de la doctrine catholique, seraient incalculables.