Cet euro-là n’a plus de sens
Draghi, Merkel, Hollande ou Juncker ont beau afficher leur unité pour sauver l’euro, la monnaie unique n’a plus de sens, estime Die Welt am Sonntag. Car les pays membres sont trop différents pour qu’une monnaie commune puisse encore fonctionner.
Michael Fabricius
L’Europe politique est arrivée au bout de ses capacités. Et pour ceux qui ne l’avaient pas encore compris, la preuve est tombée la semaine dernière. La déclaration commune du président français François Hollande et de la chancelière allemande Angela Merkel de “tout faire pour protéger ” n’était rien de plus qu’un acte de désespoir.
Dès la troisième phrase de la déclaration, il était manifeste que les pays membres de la zone euro, Allemagne et France comprises, ne partageaient plus la même approche de la crise. Les Etats, “chacun selon ses prérogatives, doivent remplir leurs obligations à cette fin". Ce qui peut aussi s’interpréter comme une capitulation : que chacun se débrouille comme il peut.
La montée des forces centrifuges
Voilà donc les derniers tressaillements de la diplomatie commune dans la zone euro. Le consensus n’est qu’une façade. Des forces centrifuges puissantes sont à l’œuvre sous la surface et prennent de l’ampleur. Un jour le patron de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, laisse entrevoir de nouvelles aides en faveur des Etats en faillite ; le lendemain, il est démenti par Wolfgang Schäuble, le ministre des Finances. La Grèce réclame plus de temps, alors que jour après jour nous parviennent de nouveaux communiqués sur les manquements du gouvernement d’Athènes, et que des responsables politiques allemands exigent ouvertement l’éviction du pays de la zone euro.
Au lieu de parler des problèmes de son pays, le ministre des Affaires européennes espagnol préfère appeler à un renforcement des aides en provenance d’Allemagne. Quant aux solutions à mettre en œuvre – achat direct ou indirect d’obligations, sauvetage des banques, programmes d’austérité – personne n’est d’accord.
L’euro meurt au Sud
Au demeurant, il n’y a qu’au Conseil de la BCE que le gouvernement allemand est en position minoritaire. Si l’on inclut les Etats membres de l’Est, la situation est déjà différente. Un profond fossé sépare le Nord et le Sud. Tôt ou tard, nous serons bien obligés de nous regarder dans les yeux et de nous avouer que cela ne fonctionne plus.
Loin de se rapprocher, les zones économiques du Nord et du Sud de l’Europe se sont éloignées en onze années d’existence de l’euro. Dans ces conditions, une monnaie commune n’a pas de sens.
Traduction de l'allemand : Jean-Baptiste Bor
Vu de Varsovie
"Le scénario le plus noir devient réalité"
“Est-ce déjà la fin de la zone euro ?” demande gravement Rzeczpospolita, alors que Wolfgang Schäuble, le ministre des Finances allemand, a rejeté l'idée d'un plan de sauvetage de 300 milliards d'euros pour l'Espagne de la part de Berlin. Le quotidien conservateur de Varsovie note que “la zone euro n’a pas d’argent de côté pour sauver l’Espagne”, et que le coût de cette opération pourrait dépasser les 300 milliards d'euros. Les spécialistes du think thank Open Europe estiment que cela pourrait aller de 450 à 650 milliards d’euros.
Dans son éditorial, Rzeczpospolita observe que “l’UE ne peut pas se permettre de sauver l’Espagne. Contrairement à la Grèce, au Portugal ou à l’Irlande, l’Espagne est simplement trop grosse”. Il faut donc espérer que :
Le plan de sauvetage de Madrid d’un montant de 300 milliards d’euros est juste une position de négociation, et que les Espagnols se contenteront de 100 milliards d’euros . Si en revanche, il s’avère que leur situation est vraiment très mauvaise, l’existence de la zone euro serait vraiment en danger.
Pour Rzeczpospolita, la crise actuelle montre à quel point “l’idée de créer une confédération d’Etats avec une monnaie commune mais avec des systèmes politiques, sociaux et économiques qui diffèrent est utopique”. Le quotidien polonais augure que “nous observons le début de la fin du modèle actuel d’union monétaire”. Le problème du sauvetage espagnol sera probablement résolu par :
L’impression de monnaie de singe par la Banque centrale européenne. Mais cela ne mettra pas un terme à la farce. Tôt ou tard certains s’effondreront et la pyramide de prêts mutuel s’écroulera. Donc à moins que la zone euro change, il n’y a pas de quoi dépenser de l’argent pour reporter l’exécution.
http://www.presseurop.eu/fr/content/art ... um=twitter
Il est fort probable que l'euro reçoive prochainement l'Extrême-onction.