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Si l'on voulait avoir une idée exacte et précise de la réalité du « sentiment européen », exalté aussi bien par les thuriféraires de l'UE que par les aficionados de « l'Europe puissance », le cas Grec nous a donné une réponse aussi glaçante qu'indiscutable. C'est en effet bien simple: en dehors des discours, des ouvrages savants et des conversations enflammées de fond de bars, il n'existe pas.
Le peuple grec, héritier des fondateurs de cette civilisation sensée être si chère et précieuse au coeur de tous les hommes de Brest à Bucarest, crève aujourd'hui dans l'indifférence la plus complète et la plus générale.
Athènes brûle, les files d'attente devant les magasins d'alimentation s'allongent, les salaires sont sabrés quand ils sont encore payés, le pays est mis sous la tutelle des oligarques financiers, on humilie quotidiennement la population privée de toute souveraineté... et non seulement cette situation ne suscite aucun élan de solidarité mais qui plus est, elle est accompagnée, dans les autres pays d'européens, d'un curieux et émétique mélange de lâche soulagement et de défoulement hargneux. Le soulagement, c'est celui du piéton qui se réjouit que ce soit son voisin de trottoir qui ait été fauché par un chauffard. « Plutôt lui que moi... Tant que c'est lui, ce n'est pas moi... Ce n'est pas passé loin mais je m'en sors bien... » soupire-t-il alors avant de rentrer à la maison se coller au fond du canapé et devant son téléviseur. Le défoulement c'est celui de l'imbécile qui a bien bu, avalé et digéré la bouillie médiatique expliquant que les grecs étaient « responsables » de leur situation, qu'à force de « profiter » et de « tricher », il fallait bien qu'ils « payent un jour l'addition » et que n'ayant jamais faits d'efforts il était bien normal et fort juste qu'on leur en demande aujourd'hui de drastiques... Et chacun de répéter, avec le petit air hautain et convaincu de celui qui sait, à qui on ne la fait pas, sa petite et si originale histoire de maison éternellement en chantier pour échapper à la fiscalité ou de faux aveugles touchants de somptuaires pensions... Non seulement, au fond, « ils l'ont bien mérité » mais en plus, ces cons, avec leur huile d'olive frelatée et leurs combines minables, ils ont bien failli mettre en danger notre portefeuille à nous, notre petit confort, notre « pouvoir d'achat »! Quelle bande de salopards! On devrait les virer de l'UE pour la peine! De toute façon, tous ces gens du sud, pas très propres, fainéants comme des couleuvres, des hispagouins aux ritals, on ne peut jamais compter sur eux, encore moins pour relancer la croissance! Ces pays là, c'est sympa pour y boire un coup et photographier de vieilles pierres, mais y'a rien à en tirer en terme d'efficience économique et de dynamisme financier... D'ailleurs les grands humanistes du FMI et de Goldman Sachs l'ont bien dit! C'est un coup à se prendre une mauvaise note par tonton Moody's!
Au fond, ce serait si bien si on pouvait se débarrasser de ces peuplades de pue-des-pieds pour ne rester qu'entre gens biens, avec de beaux industriels allemands, bien sérieux et besogneux, et d'habiles diamantaires flamands, bien gras et économes... Mais ne rêvons pas trop...
En fait, après réflexion, le « sentiment européen » existe bien malgré tout, il consiste à vénérer ses riches voisins, non pas parce qu'on les aime vraiment mais parce que, au moins, on se dit qu'on pourra leur taper la pièce en cas de coup dur , et à mépriser ses cousins pauvres, qui ne servent strictement à rien... Le « sentiment européen » aujourd'hui, c'est l'esprit bourgeois à l'échelle d'un continent.