C'est plus récent. Les deux Valentin n'étaient pas les patrons des "amoureux" quand Gélase a institué la fête.
Ce n'est qu'à la fin du Moyen Âge qu'on a associé l'amour courtois à cette fête (par exemple, à la cour de Bourgogne sous les Valois).
La fête des lupercales était une pratique totémique n'ayant pas grand chose à voir avec que qu'on entend aujourd'hui par "célébrer l'amour". De plus, c'est la purification de la Vierge et non la Saint-Valentin (fête inexistante à l'époque) qui remplace cette cérémonie.
Un article de Salomon Reinach sur le sujet des flagellations rituelles et les extraits qui nous intéressent :
http://www.psychanalyse-paris.com/La-fl ... uelle.html
Mannhardt a longuement traité de la flagellation rituelle dans son beau mémoire sur les Lupercales . Comme ce travail n’a jamais été, que je sache, traduit ni même résumé en français , je crois utile d’en dégager ici les idées principales, c’est-à-dire de recourir à la source où ont puisé MM. Frazer et Thomsen.
Les Luperques étaient des prêtres romains qui, le 15 février, couraient par la ville, vêtus seulement de peaux de chèvres, et qui frappaient sur le dos et sur les mains, avec des lanières en cuir de chèvre, les femmes qu’ils rencontraient. Cette flagellation, au-devant de laquelle se portaient les Romaines, passait pour les rendre fécondes. La fête comportait d’autres rites de purification, tant des personnes que des choses, sur lesquels il est inutile de nous arrêter . Elle fut supprimée en 496 seulement par le pape Gélase, qui la remplaça par la fête de la Purification de la Vierge (2 février).
Pourquoi les Luperques frappent-ils avec leur lanière (februum), au lieu de se contenter de toucher ? Ici interviennent les faits parallèles que Mannhardt a réunis et fait valoir. Dans le culte secret de Fauna, à Rome, on croyait assurer la fertilité aux femmes en les frappant avec une branche de myrte. Lors d’une fête de Déméter, que nous ne connaissons pas plus exactement, ceux qui la célébraient se frappaient les uns les autres avec des baguettes. À Rome, le 7 juillet, à la fête des nones caprotines, les femmes s’injuriaient et se frappaient, probablement avec des branches de figuier sauvage. Les Arcadiens frappaient l’image de Pan avec des seilles ou oignons marins. En Ionic, à une époque très ancienne, lorsqu’il y avait famine ou pestilence, on commençait par affamer un homme, puis on le conduisait en un lieu consacré, on le bourrait de figues, de fromage, de pain d’orge, enfin on le jetait à terre et, avec une verge composée de scilles, de branches de figuier sauvage et d’autres arbres, on le frappait sept fois sur le membre viril. À Chéronée, du temps de Plutarque, on fouettait un esclave avec des branches d’agnus castus et on le chassait avec ces mots : « Dehors famine ! Entrez, Abondance et Santé ! » Ces rites, qui rappellent celui du bouc émissaire chez les Hébreux, sont évidemment d’origine agricole : ce sont les mauvais esprits, ceux qui nuisent à la fécondité des terres, qui sont chassés, honnis, battus, parfois lapidés et brûlés. Mais Mannhardt a parfaitement reconnu que, dans une phase religieuse antérieure, il ne s’agit pas tant de maltraiter et d’expulser le démon nocif que d’exalter et de fortifier le bon génie de la moisson, représenté par un homme, un animal ou une image, en détruisant, au moyen de coups, les influences pernicieuses qui pèsent sur lui. Ainsi, en Westphalie, le jour de la fête de Saint-Pierre (22 février), les enfants frappent les portes avec des marteaux en criant : « Dehors, l’oiseau de l’été ! » L’oiseau de l’été s’est réfugié pendant l’hiver dans la maison ; il faut l’en faire sortir, comme les Romains faisaient sortir le dieu de la Guerre lorsqu’ils ouvraient les portes du temple de Janus. Nous avons déjà vu que l’on flagellait l’image de Pan en Arcadie ; à Délos, on traitait de même l’image d’Apollon. Évidemment, Pan et Apollon ne sont pas des mauvais génies ; on les frappe, comme les Luperques frappaient les femmes, afin de les rendre féconds et bienfaisants.
Dans les rites agraires de l’Europe, on connaît de nombreux exemples où le « roi de Mai » et d’autres personnifications de la moisson donnent et reçoivent des coups. Mannhardt a étudié, dans un autre ouvrage, une série de coutumes qu’il a réunies sous le nom de Schlag mit der Lebensruthe (fustigation avec la verge de vie) . Au Mardi gras, à Pâques, au 1er mai, à Noël, les hommes et les femmes se battent entre eux ou battent leurs serviteurs et ceux qu’ils rencontrent avec des branches feuillues, des faisceaux de branches ou des lanières de diverses couleurs ; ce sont surtout les filles nubiles et les femmes qui sont ainsi frappées par les hommes, sur les mains, les doigts, les pieds ou le dos. On frappe aussi de même les animaux domestiques et les arbres fruitiers. Souvent, en frappant, on crie : « La maladie au loin ! La santé dans tes membres ! Dehors, le mal ! etc. » Ceux qui frappent, comme les Luperques à Rome, courent à travers les champs, sous des déguisements divers qui ont passé aux fous de cour du Moyen Age, comme la baguette de ceux-ci est devenue la marotte de ceux-là. Charvet, dans son Histoire de la sainte église de Vienne, a décrit un usage, supprimé au XVIIe siècle seulement, dont il a lui-même noté l’analogie avec les Lupercales. Il est vrai qu’il n’y est pas question de coups, sans doute parce que le vieux rite avait été humanisé par l’Église. « On célébrait à Vienne tous les ans, le premier jour de mai, une fête appelée la cérémonie des Noircis... L’archevêque, le chapitre, l’abbé de Saint-Pierre et celui de Saint-André nommaient chacun un homme qui se noircissait tout le corps pour courir les rues dans un état de nudité depuis le matin jusqu’après le dîner, etc. » Le passage est trop long pour être cité ici, mais cette seule phrase suffit à prouver qu’il s’agit d’une course compliquée de mascarade, avec, en outre, la nudité rituelle qui témoigne toujours d’un état de choses très ancien.
Mannhardt n’a pas manqué de se demander, comme le feront sans doute quelques-uns de nos lecteurs, si le rapport établi par ces usages entre la fustigation et la fécondité ne s’expliquerait pas par un ordre de faits physiologiques qui sont du ressort de la psychopathia sexualis. Le savant mythologue a eu raison de repousser cette idée, car les faits en question ne se constatent que dans des civilisations avancées et dissolues ; l’Antiquité même n’en offre guère qu’une seule mention (dans le Satyricon de Pétrone) et il n’en est rien dit dans la littérature moderne avant le XVe siècle, alors que les livres pénitentiaux du Moyen Âge s’en seraient certainement occupés si l’état des moeurs avait appelé sur ce sujet l’attention des directeurs de conscience.
Mais la conclusion adoptée par Mannhardt est certainement à côté de la vérité. Il croit que l’objet de la fustigation est d’éloigner les mauvais esprits, les démons de l’infécondité et de la malvenue. Cela n’explique point la pratique si répandue de fustiger avec les branches de certains arbres, avec des lanières de cuir de certains animaux. M. Frazer, qui a étudié à son tour le problème et allégué des quantités de faits analogues constatés en Afrique, en Asie, en Amérique et en Australie , dit avec raison que les flagellations n’ont jamais pour but d’éprouver le courage de la victime, mais de la purifier ; toutefois, il ne tient pas compte non plus, semble-t-il, de l’instrument du supplice, et son explication, n’expliquant pas tous les détails, ne peut être considérée comme adéquate.
C’est avec des lanières de cuir de bouc ou de chèvre que les Luperques frappent les Romaines, et la déesse qui préside à la cérémonie, dea Luperca, participe à la fois de la louve et de la chèvre (lupus, hircus). Donc, le but de la flagellation, c’est de faire passer dans le corps du patient la force et la vitalité soit de l’arbre, soit de l’animal, c’est-à-dire sans doute d’un ancien totem. Qu’est cela, sinon une vieille forme de cette idée de la communion, que l’on retrouve un peu partout dans les religions primitives et populaires, depuis qu’on prend la peine de l’y chercher ? La théophagie n’est que la forme la plus répandue et la plus tenace de la communion ; mais la superstition connaît bien d’autres manières d’absorber et de s’assimiler l’énergie d’un arbre, d’un animal, de la terre elle-même, par exemple en passant par la cavité d’un chêne, en revêtant la dépouille d’un loup ou d’un chien, en se couchant à terre